L’autoliquidation de la TVA en France
(De quelques difficultés relatives à la détermination du domaine d’application du mécanisme d’autoliquidation)
En bleu; les liens, remarques et solutions apportés par DAGTVA
Origine du document : Chambre de Commerce et d’Industrie de Bourgogne
Le cadre juridique français de la TVA relatif aux prestataires de services et aux fournisseurs de biens établis en dehors du territoire français a été considérablement modifié depuis le 1er septembre 2006. Il est important, notamment pour les entreprises assujetties à la TVA en France qui font appel à des opérateurs établis à l’étranger pour la livraison de biens ou de services taxables en France, de connaître les nouvelles règles en vigueur pour mieux les utiliser et éviter les sanctions fiscales éventuelles.
La présente fiche technique a pour objectif de rappeler le mécanisme mis en place par le droit français et d’attirer l’attention des entrepreneurs sur certaines difficultés d’application auxquelles ils sont susceptibles d’être confrontés.
Présentation du mécanisme de l’autoliquidation de la TVA
Depuis le 1er septembre 2006, les opérateurs établis à l’étranger qui réalisent des opérations imposables en France ne sont plus redevables de la TVA exigible à ce titre lorsque leur client dispose d’un numéro d’identification à la TVA en France, sauf dans certains cas où la loi prévoit le contraire. Ainsi, le prestataire étranger peut facturer hors taxe, à charge pour son client d’acquitter la TVA. (La porte vient de s’ouvrir vers les carrousels TVA qui coûtent, par an,10 à 15 Mrds€ à la France et 118.8 Mrds€ à l’Union Européenne (2009). DAGTVA met un terme définitif aux carrousels TVA).
Le mécanisme de l’autoliquidation (« reverse charge ») procède d’une volonté de simplification et de rationalisation fiscale. Il consiste en l’inversion du redevable légal de la TVA. En effet, auparavant, c’était le plus souvent le prestataire des services (ou le vendeur) qui facturait et acquittait la TVA. Ainsi, la société étrangère en réalisant une opération en France devait s’immatriculer et déposer des déclarations auprès du fisc français. Le système de l’autoliquidation a précisément pour objectif de remédier à ces lourdeurs. (DAGTVA apporte plus de simplification sur la liquidation de la TVA par prélèvement libératoire, associé à chaque règlement d’achat, lors du paiement de l’acheteur, opération automatique réalisée par les banques. Avec DAGTVA il n’y a plus de circulation de fonds entre assujettis à la TVA contenant la valeur de la TVA).
Il ne s’agit pas de modifier la règle de territorialité de la TVA, mais de désigner un autre redevable légal. Le droit communautaire, par le biais de la 6e directive TVA 77/388 du 17 mai 1977, avait déjà introduit le système en le rendant obligatoire pour certaines prestations (acquisitions intracommunautaires, prestations immatérielles, transport intracommunautaire… ) et en laissant pour le reste le choix aux États membres de continuer à appliquer le principe de la TVA due par le prestataire ou bien de désigner le client comme redevable légal.
Si la tendance actuelle dans les États membres est à l’introduction de l’autoliquidation, il est important de se renseigner pour chaque pays donné dans la mesure où l’harmonisation n’est pas complète.(Principes de subsidiarité de l’Union Européenne).
C’est dans ce contexte que la France a opté en faveur de la généralisation du système de l’autoliquidation en adoptant l’article 94 de la loi de finance rectificative du 31 décembre 2005, lequel a modifié l’article 283 du Code général des impôts. Le nouveau dispositif, qui a été commenté dans une instruction 3 A-9-06 du 23 juin 2006, est entré en vigueur à partir du 1er septembre 2006. Ainsi, la plupart des prestations réalisées depuis cette date par des sociétés étrangères en France (achat-revente, installation-montage, transport interne, prestations culturelles, artistiques ou sportives…) peuvent être facturées sans TVA, celle-ci étant collectée et déduite par le client dans les conditions de droit commun.
Obligations pour le prestataire / fournisseur étranger
L’opérateur étranger devra émettre des factures HT à son client identifié à la TVA en France. Ces factures doivent faire apparaître distinctement que la TVA est due par le client et mentionner les dispositions de la 6e directive (article 21-1 a) ou du Code général des impôts (article 283 -1) justifiant que la taxe ne soit pas collectée par le fournisseur.
Obligations pour le client (acheteur français) identifié à la TVA en France
Le client (acheteur français) doit payer la TVA française aux services fiscaux français par le biais de l’autoliquidation. Il doit déclarer le montant hors taxe de l’opération sur ses déclarations de TVA (sur la ligne « Achats de biens ou de prestations de services réalisés auprès d’un assujetti non établi en France »). La TVA française ainsi acquittée peut ensuite être déduite par le client dans les conditions habituelles. Le défaut d’autoliquidation est sanctionné par une amende égale à 5% du montant de la TVA qui n’a pas été correctement autoliquidée.
(DAGTVA ne permet plus que le montant de la TVA puisse transiter entre les assujettis par le biais de la différence de la valeur de la TVA, entre le moment ou l’acheteur à payé son achat hors taxe et, le moment où il a revendu cet achat avec TVA et bénéfices. C’est l’actuel principe simplifié du carrousel TVA où l’acheteur revendeur disparaît (opérateur défaillant) après avoir revendu, encaissé la TVA et bénéfices, à ajouter pour le Trésor Public aux autres pertes liées à la fiscalité des entreprises).
L’exception : le système du « répondant »
Il convient de rappeler que les parties peuvent, en vertu d’une tolérance administrative prévue par l’instruction 3 A-9-06 du 23 juin 2006, déroger au système de l’autoliquidation par un accord écrit stipulant que la TVA française due par le client soit déclarée et acquittée au nom et pour le compte de celui-ci par le fournisseur ou le prestataire étranger. Ce dernier désigne alors un « répondant » qui se chargera à déposer les déclarations pour le compte de l’opérateur étranger. A noter toutefois que même dans cette hypothèse le client français demeure redevable légal : il serait tenu d’acquitter la TVA si le répondant ne respectait pas ses obligations.(DAGTVA impose que le répondant soit lui aussi déclaré et agréé au dispositif, ce qui valide la stabilité de l’établissement répondant mais aussi, comptabilise automatiquement dans les comptes de celui-ci, les chiffres d’affaires des entreprises représentées. La procédure contrôle tout, comme il est expliqué dans la page consacrée à la fin du « double irlandais ». A titre d’exemple DAGTVA, c’est la fin du pillage de la fiscalité de l’économie numérique qui est en grande partie dématérialisée, pillage largement médiatisé par la mise en cause des géants de l’Internet).
De quelques difficultés lors de la détermination des fournisseurs et prestataires concernés par le mécanisme de l’autoliquidation
Si en théorie la simplification est indiscutable en ce que la réforme permet de dispenser dorénavant d’immatriculation de nombreuses sociétés étrangères réalisant des opérations taxables en France, en pratique certaines difficultés d’interprétation conduisent à placer l’opérateur étranger dans une relative insécurité juridique. L’une d’entre elles concerne plus précisément la notion d’établissement stable, notion qui conditionne le régime de paiement de la TVA et l’application des nouvelles règles.
En effet, le dispositif d’autoliquidation mis en place depuis le 1er septembre 2006 s’applique aux opérations effectuées par les assujettis (fournisseurs ou prestataires de services) établis hors de France. Peuvent donc en bénéficier, sans distinction, tous les assujettis établis dans un autre État membre ainsi que tous ceux établis en dehors de la Communauté européenne.
Inversement, les opérations effectuées par des assujettis établis en France ne sont pas concernées par le mécanisme de l’autoliquidation.
Or, dans certaines hypothèses il peut apparaître délicat de déterminer avec certitude si un opérateur étranger doit ou non être considéré comme établi en France.
Les critères non pertinents pour déterminer le lieu d’établissement du prestataire/ fournisseur
Prenons l’exemple d’une société étrangère, immatriculée au RCS en France, qui réalise durant plus de douze mois un chantier en France pour un client français. Cette société étrangère facture par la suite la TVA française, en mentionnant un numéro de TVA intracommunautaire française (numéro qu’elle aurait, par exemple, pu conserver du passé), avec l’adresse du chantier en France, et donc avec toute l’apparence d’un redevable français. D’ailleurs, son chantier serait qualifié d’établissement stable au regard des règles de fiscalité directe, ce qui permet dans cette hypothèse d’assujettir en France l’opérateur étranger en matière d’impôt sur les sociétés. Mais la société étrangère sera-t-elle considérée pour autant comme établie en France au regard des règles de la TVA ?
Il conviendra de répondre par la négative dans la mesure où aucun des critères mentionnés dans l’exemple ci-dessus n’est pertinent pour considérer que la société étrangère est établie en France au regard des règles régissant l’autoliquidation de la TVA. Ainsi, la détention d’un numéro d’identification à la TVA en France par l’assujetti étranger n’a aucune incidence sur l’application du texte dès lors qu’il n’y est pas établi. Les critères de durée qualifiant la présence d’un établissement stable au sens des conventions fiscales bilatérales applicables en matière de fiscalité directe ne sont pas non plus transposables à la TVA.
Par conséquent, la société allemande dans notre exemple ne peut être désignée comme redevable légal de la TVA française et le mécanisme de l’autoliquidation doit jouer. Le client français qui n’aurait pas auto-liquidé s’exposerait ainsi à une amende égale à 5% du montant de la TVA concernée, outre le risque de se voir refuser la déduction de la TVA qui lui a été facturée à tort par le fournisseur étranger.
Il n’est donc pas aisé de s’assurer que le prestataire / fournisseur étranger avec lequel on contracte est établi ou non en France, ce qui engendre une insécurité juridique regrettable. (En reprenant les derniers arguments des commentaires sur « le système du répondant », avec DAGTVA, il n’y a plus même à se poser la question sur une quelconque ambiguïté possible, sur la désignation de celui qui doit s’acquitter de la liquidation de la TVA en France, suite au prélèvement automatique libératoire de la TVA sur le paiement de l’objet ou du service acheté au moment ou ce paiement rentre dans le circuit bancaire).
Les indications fournies par les textes et la jurisprudence
Les textes ne sont pas d’une grande précision. La directive communautaire TVA de 1977 dispose dans son article 9 § 1 :
« Le lieu d’une prestation de services est réputé se situer à l’endroit où le prestataire a établi le siège de son activité économique ou un établissement stable à partir duquel la prestation de services est rendue ou, à défaut d’un tel siège ou d’un tel établissement stable, au lieu de son domicile ou de sa résidence habituelle. »
Mais, il est possible de remarquer que si la directive emploie la notion d’établissement stable aux fins de détermination du lieu d’imposition, elle ne la définit pas pour autant.
Selon la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, il convient d’interpréter l’article 9 de la 6e directive comme accordant une prééminence au critère du siège de la société. Ainsi, l’endroit pertinent serait celui où le prestataire a établi le siège de son activité économique, la prise en compte d’un autre établissement à partir duquel la prestation de services est rendue ne présentant un intérêt que dans le cas où le rattachement au siège ne conduit pas à une solution rationnelle du point de vue fiscal ou crée un conflit avec un autre État. Elle précise que pour retenir l’existence d’un établissement stable, il doit présenter un degré suffisant de permanence et de structure apte, du point de vue de l’équipement humain et technique, à rendre possibles, de manière autonome, les prestations de services considérées.
L’ Administration fiscale donne de l’établissement stable une définition quelque peu différente. L’établissement stable serait « tout centre d’activité où l’assujetti effectue de manière régulière des opérations imposables. Ce centre d’activité est généralement constitué par un magasin ou un bureau, une usine, un atelier, un chantier connu de la clientèle, dirigé par le chef d’entreprise ou par un préposé qui a le pouvoir d’engager des opérations pour le compte du chef d’entreprise. »
La convention type de l’ O.C.D.E., pertinente uniquement en matière de fiscalité directe comme cela a été rappelé précédemment, retient sa propre définition. Le terme « établissement stable » y désigne une installation fixe d’affaires où l’entreprise exerce tout ou partie de son activité. Ainsi, constitue, au sens de cette convention, des établissements stables notamment un siège de direction, une succursale, un bureau, une usine, un atelier, un chantier de construction et de montage dont la durée dépasse douze mois.
La multitude de définitions différentes et l’insécurité juridique qui en résulte ont conduit la direction de la législation fiscale à préconiser l’autoliquidation systématique afin d’éviter tout risque. Cette solution n’est cependant pas sans inconvénient puisqu’elle débouche sur une double liquidation de l’impôt.
Le Centre des impôts des Non Résidents, quant à lui, suggère d’utiliser l’immatriculation au RCS de la société étrangère comme indice faisant présumer son établissement en France.
Une autre piste préconisée est l’unification de la notion d’établissement stable en matière d’impôt sur les sociétés et de TVA. Mais cela nécessitera un travail délicat d’adaptation des critères dans la mesure où la fiscalité directe et la fiscalité indirecte ne sont pas mues par des considérations identiques. Ainsi, la notion d’établissement stable en matière d’impôts directs vise à répartir le pouvoir d’imposer un revenu entre résidence et source, alors qu’en matière de TVA, il s’agit d’appréhender un acte de consommation.
Enfin, il pourrait être tentant, dans le doute, de recourir au système du « répondant ». Mais, ce mécanisme ne répond qu’imparfaitement à la difficulté dans la mesure où, comme cela a été déjà évoqué, le client demeure tenu de s’acquitter de la TVA (avec le cas échéant les majorations et les pénalités de retard) si le fournisseur ou son « répondant » ne liquide pas correctement la TVA ! Ce risque explique sans doute pourquoi plus d’un an après l’entrée en vigueur de la réforme le système du répondant n’a été que très peu mis en pratique par les entreprises.
Dans l’attente de nouvelles précisions réglementaires ou jurisprudentielles, il convient, en définitive, avant d’autoliquider la TVA, de vérifier :
– que le siège de l’activité du cocontractant étranger est situé hors de France, c’est-à-dire qu’il exerce à l’étranger l’ensemble de son activité (usine, bureau, magasin…) ;
– qu’il ne dispose pas en France d’un établissement stable en tenant compte à la fois de la définition jurisprudentielle et de celle retenue par l’Administration fiscale ;
– s’agissant des hypothèses où aucun lieu d’exploitation ou d’établissement ne peut être retenu (cas des marchands ambulants, prestataires travaillant au domicile de leurs clients…), qu’il n’a pas fixé en France son domicile ou sa résidence habituelle.
(Avec DAGTVA toutes les incertitudes et ambiguïtés sont levées. Les jurisprudences ne seront plus invoquées et mises en avant par l’extrême simplicité du processus de DAGTVA qui ne laisse pas d’autre choix que de prélever la TVA sur le règlement de l’achat. Ci celui-ci fait suite à une transaction entre états membres de l’E.U., donc en hors taxe, la TVA ne sera pas due tant que cet acheteur (s’il s’agit du même produit comme un téléphone mobile) ne revend pas son achat avec TVA et bénéfices. S’il revend, l’acquéreur sur son règlement bancaire, qu’il ou non assujetti à la TVA, paiera la TVA et fiscalisera automatiquement le vendeur, sachant que celui-ci, par prélèvement libératoire, ne sera jamais crédité de la TVA qu’il doit à au trésor public sur cet achat).
Cette page d’information renvoie vers une étude approfondie de cette nouvelle procédure fiscale autoliquidative qui n’autorise plus aucune fraude fiscale.